LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

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SICARIO, le territoire des loups

Thriller                                          

Denis Villeneuve 

***** 

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-  Nothing will make sense to your American ears, and you will doubt everything that we do, but in the end you will understand.

 

 

 

Droit dans le mur. Mais pour le meilleur.

Une intervention efficace, rapide et brutale des forces de l'ordre débouche sur un spectacle d'horreur et de désolation. La séquence d'ouverture donne le ton. Sicario avance et grogne comme un fauve implacable.

 

La partition sonore de Johann Johannsson ( Prisoners, Foxcatcher)  fait gronder le coeur des ténèbres. La photographie sèche et puissamment contrastée de Roger Deakins exhibe toutes les plaies d'un paysage gangrené, scarifié par la violence. Sicario est ainsi. Il se jette sur vous, vous tient un long moment dans sa gueule en louvoyant dans la pénombre avant de plonger dans le noir et d'exploser à nouveau. Un de ces thriller qui vous abandonne avec élégance dans les pas du diable.

Juarez. Portail du trafic de drogue vers les USA. L'enfer sur terre. La violence des cartels ne connait plus de limites. Les notions de loi et d'ordre ne sont plus que des chimères défendues par une police corrompue ou pétrifiée. Les victimes, découpées comme des quartiers de viande sont pendues au pont, exposées aux yeux de tous, en pleine ville. Méthode implacable de la terreur et de l'effroi. C'est en se rendant dans cette cité en plein chaos, pour exfiltrer un criminel en toute clandestinité, que la jeune Kate Macer,  agent du FBI, prend sa leçon. Le combat contre les narco-trafiquants ne semble s'effectuer efficacement qu'en dehors du cadre des procédures légales. Autour d'elles, des hommes rompus au combat. Aussi efficaces et déterminés que les tueurs qu'ils pourchassent. À leur tête, Matt Graver et le mystérieux Alejandro. Tous sont guidés et avancent, hors cadre, suivant une logique et des méthodes de guerriers. La femme de loi n'est plus en territoire connu.

 

- You should move to a small town where the rule of law still exists. You will not survive here. You are not a wolf. And this is the land of wolves now. 

 

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Saluons les prestations habitées d'un Josh Brolin affichant une  royale et déroutante nonchalance Texane, et d'un Benicio Del Toro opaque et écrasant. Mais attardons nous sur le personnage témoin. Avec peu de mots, par la seule expression de son regard l'actrice Emily Blunt nous embarque instantanément dans cette "expédition punitive" qu'elle va vivre minute après minutes sans  avoir aucune maîtrise du déroulement des évènements.

Son regard vierge est celui du spectateur se prenant les séquences en pleine figure. L'actrice guerrière d'Edge of Tomorrow traduit ici à la perfection l'attente, l'égarement puis l'effroi qui la gagne en réalisant que sa mission l'entraîne bien au-delà de son monde connu. L'identification et l'immersion du spectateur sont totales. 

 

Sans repères, bousculée, entraînée dans la spirale d'une mission conduite avec une détermination sans bornes, ce "personnage-spectateur" s'interroge en permanence sur la moralité de l'action tout en mesurant l'efficacité de la méthode. Un douloureux paradoxe pour une représentante de la loi reconnue jusqu'ici pour son extrême professionnalisme. Le tour de force du film est d'opérer ensuite un virage narratif radical. 

Nous allons abandonner cette figure centrale pour rester dans les pas du "Sicario". Le tueur à gages. Comme une affirmation que la frontière entre le bien et le mal est définitivement franchie... Mais ne spoilons pas davantage. 

 

Le réalisateur Denis Villeneuve surprend de nouveau. C'est la marque des grands. Prendre sans cesse de l'altitude. Se réinventer à chaque film. La suite le prouvera avec Dans incursion épatante dans la SF qui pense avec l'énigmatique et fascinant Arrival, Premier Contact et le stupéfiant développement d'un mythe du septième art (d'ailleurs tout aussi incompris et dévalué à sa sortie que l'original)  Blade Runner 2049

Ici, en 2015, après un Prisoners, gris, pluvieux, à hauteur de regard,  Sicario prend son envol, multiplie les plans aériens sous un soleil écrasant comme pour mieux souligner la portée dérisoire du combat des hommes au coeur d'un désert d'apocalypse.  Tel le point de vue d'un dieu impuissant. Un mur, frontière dérisoire sépare un paysage partageant la même désolation. Ainsi s'exprime l'inexorable contagion du mal. L'oeuvre est ainsi. Aussi dense et tragique que sobre et dépouillée. D'une radieuse maitrise sur la forme mais conduisant le spectateur au coeur du chaos.

 

 

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Sicario est un modèle d'intensité narrative.

Une leçon de cinéma, simple, directe, fluide et tendue comme une corde de violon.

Le découpage technique affuté et le tempo admirable du montage nitroglycérinent  l'attention. La somptueuse photographie de maître Roger Deakins assume un réalisme exalté. Qu'elle grille de chaleur ou s'ouvre sur des crépuscules enflammés Sicario est une merveille visuelle de chaque plan, provoquant chez l'amateur de cadrage au cordeau une succession quasi ininterrompue d'orgasmes oculaires. 

À ce niveau de gestion du stress et de maitrise du cadre, c'est du kidnapping de cinéphile. Un de ces films que l'on découvre avec ravissement et que l'on revoit avec extase. (On le sait bien, les grands films se développent encore plus à la revoyure).

 

À l'heure ou sort le second chapitre de Sicario qui me semble un chouille "Rambo-isé" je ne puis que vous conseiller une nouvel séance de ce chef-d'oeuvre du narco-polar. Jouir de cette irrésistible élégance. Celle de nous faire goûter aux ténèbres sans cesser de nous éblouir.

 

 

Francisco,

 

 

 

 



 

Villeneuve


  

 

 

 

 

 

 

L'avis des lecteurs 

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Spinaltap

 

La longue séquence d'exfiltration à Juarez, quel morceau de cinéma ! Grand film. Bienvenue dans un cauchemar opaque.

 

Mr KlydeBaro

 

Terrible constat d'un combat perdu d'avance et d'une justice qui doit renoncer à toutes ses valeurs pour faire face à ce fléau. Quelle réalisation! Du grand art !

 

Nico

 

Sec, brutal, viscéral, tendu comme la corde d'une arbalète, pas une once de gras, tellement efficace que ça en devient poétique, si peu de concession son évidence devient troublante, Miss Blunt au sommet de son intensité, Benicio qui prouve par sa seule présence l'existence des ondes gravitationnelles, pas de frime, du CINÉMA.... SICARIO POR TODOS!!!!

 

 L'anominus

 

j'ai savouré comme il se doit cette pépite de narco-polar chiadée à l'extrême. C'est un peu la quintessence de l'art.

  

 

  

À suivre                                                                                                                      Chronique

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2015

 

2H

 

LE BLU-RAY     Nous sommes ici à l'extrême pointe de la HD. La photographie sèche et solidement contrastée de Roger Deakins délivre un niveau de détail ahurissant et une précision redoutable. Un top démo que les plus malades d'entre nous rachèteront sans doute, dans quelque temps, en 4K UltraHD pour jouir pleinement des richesses de ce master chirurgical.

 

 

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24/04/2016
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