LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

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JAUJA, Lost in La Pampa

Conte     Songe méditatif

Lisandro Alonso 

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Jauja n'est pas un film d'auteur mais un poème.

Je suis entré sans trop de peine dans cette rêverie du cinéaste argentin Lisandro Alonso. Au coeur d'une Patagonie fantasmatique. Dans la culture sud-américaine la frontière entre rêve et réalité est souvent poreuse. Des oeuvre littéraires de Jorge Luis Borges et Mario Vargas Llosa aux films de Raul Ruiz, le temps et l'espace s'ouvrent sur de vertigineux labyrinthes. Il n'y a pas de leçon là où le sens se perd. Dans Jauja la lumière et les silences, l'attente et l'absence, règnent ici sur tous les discours.  Les dialogues sont vains et ceux qui les prononcent semblent ne plus y croire. Les personnages évoluent dans le cadre comme des figurines. Ombres ou fantômes solitaires.

Une fugue radicale mais envoûtante pour qui aspire à  se retrouver perdu. Une expérience toujours régénérante dans la vie d'un cinévore. Tant d'oeuvres visionnées, parfois brillantes, mais trop souvent prévisibles. De l'histoire d'un père parti sur les traces de sa fille "prisonnière du désert" le réalisateur coupera tous les ponts avec le propos de départ pour dissoudre son personnage principal et déjouer toutes les attentes du spectateur.

Joué avec un total abandon par le magnétique acteur-peintre et poète Viggo Mortensen, ce capitaine, plus seul encore que Don Quichotte, traverse le paysage, semble un instant toucher au but avant de s'égarer totalement.

 

 

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Mais Jauja n'est pas le genre d'oeuvre à conseiller avec insistance tant la traque dans laquelle se lance le personnage est destinée à l'échec. Figée dans des plans-séquence le plus souvent fixes, l'action devient vite dérisoire et se déroule sans gloire ni démonstration d'héroisme. Voir ce film classé dans la catégorie western est non-sens absolu. Soyons clair, il ne se passe rien ou presque dans JaujaC'est l'histoire d'un homme vide à qui l'on retire sa dernière raison de vivre. Un "petit soldat de plomb" condamné à se perdre dans l'immensité de la nature. Seulement voilà, il y a du génie dans JaujaLoin de la posture confortable d'un "cinéma de l'errance", la déconstruction du personnage comme du récit s'achèvera dans un dernier acte fabuleux. Une incroyable remise en perspective spatiale et temporelle défiant toute les lois de la logique. Ouvrant alors ce poème à une multitude d'interprétations. Cette audace est le propre d'un 7ème art en totale liberté. 

 

Filmé au format 1:33, ce format carré des premiers films de l'histoire du cinéma, la splendeur de la photographie offre quelques tableaux mémorables comme une magnifique nuit étoilée et un final totalement féérique. Le cadre comme le jeu des acteurs et leur position dans l'espace évoquent directement les grandes heures du cinéma muet et les premières mise en scène frontales. Une dimension presque théâtrale. La mélancolie du propos et ce minimalisme gracieux en forme d'hommage aux origines du cinoche m'ont fait penser au cinéma de Wes Anderson.

Cinéphiles aventuriers et rêveurs patients, n'hésitez pas à vous perdre dans Jauja. C'est parfois chiant, mais toujours beau, étrange, et au final suffisamment fascinant et mystérieux pour être revu. Lisandro Alonso a fait "son" film. Un geste artistique aujourd'hui réconfortant et nourrissant. La magie du travail de l'artisan façonnant une pièce unique.

 

 

 

Francisco,

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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2014

 

1H45

 

LE BLU-RAY           Détails, Couleurs, lumières d'aubes, de soirs et de nuits étoilées ravissent l'oeil dans ce modèle de transfert HD. Un Top démo du cinéma d'auteur.

 

 

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11/01/2016
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