LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

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DESIERTO, aride et brûlant

Survival        Thriller

Jonas Cuaron

**** 

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Sec

Brutal.

Une poignée d'immigrés mexicains tentent de franchir la frontière vers les États-Unis. Un frontalier, chasseur et Marlboro-man sur le retour, va les abattre et traquer les survivants. Rien que ça. Suffisamment simple, histoire de faire dans l'universel et l'efficace.

Pour son premier film, le réalisateur mexicain et fiston d'Alfonso Cuaron, nous balance un pur survival bien engagé mais sans faire de politique. Quelques lignes de dialogues et une trame scénaristique dégraissée jusqu'à l'os pour bien nous rappeler que lorsqu'il s'agit de "protection du territoire" l'homme renoue facilement avec sa part animale. Desierto évoque le drame de l'immigration clandestine en le dépouillant de tout discours jusqu'à le ramasser tout entier sur une redoutable histoire de loup et de bêtes traquées. C'est ce qui fait pour moi toute la force de cet impressionnant moment de cinéma passé pourtant inaperçu.

 

 

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Flingué, mal noté, Desierto a tendu au public américain un miroir que celui-ci a jugé grossier et déformant. Si la France a eu l'indifférence polie il faut préciser qu'il y a de quoi être un peu dérangé  par ce massacre de migrants accomplit de manière impassible par un cow-boy légèrement frappadingue. Le premier massacre qui voit tomber, le plus souvent d'une seule balle, une dizaine de mexicains est un moment de cinéma un poil traumatisant. La logique est enclenchée. Rien n'arrêtera ce type exécutant avec le même sans-froid les hommes comme les femmes. Le découpage technique de cette séquence à vous clouer au canapé est un modèle du genre à étudier dans toutes les bonnes écoles de cinoche.

Autre atout solide: Jonas Cuaron a eu la grande intelligence de ne jamais sur-diaboliser son bad guy par une mise en scène qui l'aurait  rendu effrayant (le cliché aurait été de le traiter comme une silhouette sans visage. Un procédé suremployé mais totalement éculé depuis le camion sans pilote du mythique Duel de Spielberg)  Il le filme au contraire comme un simple chasseur rompu à sa technique et connaissant son territoire.  Un bourrin solitaire soliloquant piteusement au coin du feu. Et cette forme de détachement basculant par instant dans la névrose (efficace prestation de Jeffrey Dean Morgan) est forcément ce qu'il y a de plus glaçant. Il symbolise parfaitement l'abominable se déroulant en toute impunité dans le quotidien. Un garde-frontière traversera le film à deux reprises mais sans jamais s'arrêter.

 

Ce désert muet et écrasant devient le miroir de notre occidentale indifférence face à tous les drames humanitaires. Ce crime invisible de milliers d'être humains morts de vouloir fuir l'horreur en aspirant juste à la paix et à la possibilité d'un avenir. Qu'ils disparaissent en mer ou dans le désert n'empêchera jamais notre monde d'avancer fièrement vers le grand nulle part. Et ce grand vide ou se perd notre humanité Jonas Cuaron le filme d'une manière sidérante.

 

 

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Visuellement Desierto est magnifique.

Du premier au dernier plan le désert absorbe tout. L'admirable sens du cadre et de la lumière déployés ici par le directeur photo Damian Garcia font ici merveille pour étirer l'espace jusqu'à l'infini. Et la partition sonore de notre Woodkid national se coule en osmose sur la virtuose fluidité du montage. Le talent de ce compositeur trouve ici un terrain plus fécond que dans l'indigent triptique SF Divergente.

Sur un plan purement thriller je ne me suis pas emmerdé une seule seconde. De courses effrénées en instants de stupeur et d'hébétude apeurée, 1h20 d'une odieuse partie de chasse suffisent pour que la démonstration cinématographique s'affirme clairement. Peu importe que le film ait fait un petit plouf au box-office, Jonas Cuaron EST un authentique cinéaste. Dans le genre bien peuplé du "thriller-survival" ou le laid et le bâclé côtoient souvent le grand n'importe-quoi Desierto a fière allure. De son père, le jeune co-scénariste de Gravity (la première image du film fait le lien entre les deux survival) a donc hérité de cette saine obsession de l'objet parfait. Celle qui habite les plus grands artisans. Que les cadres soit posés ou à l'épaule, peu de réalisateur peuvent de vanter d'avoir accouché d'un premier film formellement aussi maitrisé.

 

Avec un budget 35 fois inférieur au chef d'oeuvre SF de son père Jonas est allé à son tour interroger notre humanité, non plus en orbite au dessus de la terre mais au coeur d'un désert aride et brûlant. Le temps, la VOD et le Blu-ray devraient rapidement rendre justice à cette efficace et puissante série B.

 

 

 

  Francisco,

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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2015

 

1H20

 

LE BLU-RAY     Magnifique! Avec ce sens du cadre incroyable étirant l'espace à l'infini la HD fait le boulot divinement. Détails, lumière, couleurs, j'appose sans hésiter le label "orgasme rétinien".  

 

 

Director:

 
 
 
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12/11/2016
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